1. I. La vie de l’homme – connaître et aimer Dieu
Dieu, infiniment Parfait et Bienheureux en Lui-même, dans un dessein de pure bonté, a librement créé l’homme pour le faire participer à sa vie bienheureuse. C’est pourquoi, de tout temps et en tout lieu, Il se fait proche de l’homme. Il l’appelle, l’aide à Le chercher, à Le connaître et à L’aimer de toutes ses forces. Il convoque tous les hommes que le péché a dispersés dans l’unité de sa famille, l’Église. Pour ce faire, Il a envoyé son Fils comme Rédempteur et Sauveur lorsque les temps furent accomplis. En Lui et par Lui, Il appelle les hommes à devenir, dans l’Esprit Saint, ses enfants d’adoption, et donc les héritiers de sa vie bienheureuse.
2. Pour que cet appel retentisse par toute la terre, le Christ a envoyé les apôtres qu’Il avait choisis en leur donnant mandat d’annoncer l’Évangile : " Allez, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous pour toujours, jusqu’à la fin du monde " (Mt 28, 19-20). Forts de cette mission, les apôtres " s’en allèrent prêcher en tout lieu, le Seigneur agissant avec eux et confirmant la Parole par les signes qui l’accompagnaient " (Mc 16, 20).
3. Ceux qui à l’aide de Dieu ont accueilli l’appel du Christ et y ont librement répondu, ont été à leur tour pressés par l’amour du Christ d’annoncer partout dans le monde la Bonne Nouvelle. Ce trésor reçu des apôtres a été gardé fidèlement par leurs successeurs. Tous les fidèles du Christ sont appelés à le transmettre de génération en génération, en annonçant la foi, en la vivant dans le partage fraternel et en la célébrant dans la liturgie et la prière (cf. Ac 2, 42).
4. Très tôt on a appelé catéchèse l’ensemble des efforts entrepris dans l’Église pour faire des disciples, pour aider les hommes à croire que Jésus est le Fils de Dieu afin que, par la foi, ils aient la vie en son nom, pour les éduquer et les instruire dans cette vie et construire ainsi le Corps du Christ (cf. CT 1).
5. " La catéchèse est une éducation de la foi des enfants, des jeunes et des adultes, qui comprend spécialement un enseignement de la doctrine chrétienne, donné en général de façon organique et systématique, en vue d’initier à la plénitude de la vie chrétienne " (CT 18).
6. Sans se confondre avec eux, la catéchèse s’articule sur un certain nombre d’éléments de la mission pastorale de l’Église, qui ont un aspect catéchétique, qui préparent la catéchèse ou qui en découlent : première annonce de l’Évangile ou prédication missionnaire pour susciter la foi ; recherche des raisons de croire ; expérience de vie chrétienne ; célébration des sacrements ; intégration dans la communauté ecclésiale ; témoignage apostolique et missionnaire (cf. CT 18).
7. " La catéchèse est liée intimement à toute la vie de l’Église. Non seulement l’extension géographique et l’augmentation numérique mais aussi, et davantage encore, la croissance intérieure de l’Église, sa correspondance avec le dessein de Dieu, dépendent essentiellement d’elle " (CT 13).
8. Les périodes de renouveau de l’Église sont aussi des temps forts de la catéchèse. Ainsi voit-on à la grande époque des Pères de l’Église de saints évêques y consacrer une part importante de leur ministère. Tels sont S. Cyrille de Jérusalem et S. Jean Chrysostome, S. Ambroise et S. Augustin, et bien d’autres Pères dont les œuvres catéchétiques demeurent des modèles.
9. Le ministère de la catéchèse puise des énergies toujours nouvelles dans les Conciles. Le Concile de Trente constitue à cet égard un exemple à souligner : il a donné à la catéchèse une priorité dans ses constitutions et ses décrets ; il est à l’origine du Catéchisme Romain qui porte aussi son nom et constitue une œuvre de premier ordre comme abrégé de la doctrine chrétienne ; il a suscité dans l’Église une organisation remarquable de la catéchèse ; il a entraîné, grâce à de saints évêques et théologiens tels S. Pierre Canisius, S. Charles Borromée, S. Toribio de Mogrovejo, S. Robert Bellarmin, la publication de nombreux catéchismes.
10. Il n’est pas étonnant, dès lors, que, dans le mouvement à la suite du deuxième Concile du Vatican (considéré par le Pape Paul VI comme le grand catéchisme des temps modernes), la catéchèse de l’Église ait de nouveau attiré l’attention. Le " Directoire général de la Catéchèse " de 1971, les sessions du Synode des évêques consacrées à l’évangélisation (1974) et à la catéchèse (1977), les exhortations apostoliques qui leur correspondent, " Evangelii nuntiandi " (1975) et " Catechesi tradendæ " (1979), en témoignent. La session extraordinaire du Synode des évêques de 1985 demanda " que soit rédigé un catéchisme ou compendium de toute la doctrine catholique tant sur la foi que sur la morale " (rapport final II B a 4). Le Saint-Père, Jean Paul II, a fait sien ce vœu émis par le Synode des évêques en reconnaissant que " ce désir répond tout à fait à un vrai besoin de l’Église universelle et des Églises particulières " (Discours 7 décembre 1985). Il mit tout en œuvre pour la réalisation de ce vœu des pères du Synode.
11. III. Le but et les destinataires de ce Catéchisme
Ce Catéchisme a pour but de présenter un exposé organique et synthétique des contenus essentiels et fondamentaux de la doctrine catholique tant sur la foi que sur la morale, à la lumière du Concile Vatican II et de l’ensemble de la Tradition de l’Église. Ses sources principales sont l’Écriture Sainte, les saints Pères, la liturgie et le Magistère de l’Église. Il est destiné à servir " comme un point de référence pour les catéchismes ou compendia qui sont composés dans les divers pays " (Synode des Évêques 1985, rapport final II B a 4).
12. Ce Catéchisme est destiné principalement aux responsables de la catéchèse : en premier lieu aux évêques, en tant que docteurs de la foi et pasteurs de l’Église. Il leur est offert comme instrument dans l’accomplissement de leur charge d’enseigner le Peuple de Dieu. A travers les évêques, il s’adresse aux rédacteurs de catéchismes, aux prêtres et aux catéchistes. Il sera aussi d’utile lecture pour tous les autres fidèles chrétiens.
13. IV. La structure de ce Catéchisme
Le plan de ce Catéchisme s’inspire de la grande tradition des catéchismes qui articulent la catéchèse autour de quatre " piliers " : la profession de la foi baptismale (le Symbole), les sacrements de la foi, la vie de la foi (les Commandements), la prière du croyant (le Notre Père).
14. Première partie : La profession de la foi
Ceux qui par la foi et le Baptême appartiennent au Christ doivent confesser leur foi baptismale devant les hommes (cf. Mt 10, 32 ; Rm 10, 9). Pour cela, le Catéchisme expose d’abord en quoi consiste la Révélation par laquelle Dieu s’adresse et se donne à l’homme, et la foi, par laquelle l’homme répond à Dieu (première section). Le symbole de la foi résume les dons que Dieu fait à l’homme comme Auteur de tout bien, comme Rédempteur, comme Sanctificateur et les articule autour des " trois chapitres " de notre Baptême – la foi en un seul Dieu : le Père Tout-puissant, le Créateur ; et Jésus-Christ, son Fils, notre Seigneur et Sauveur ; et l’Esprit Saint, dans la Sainte Église (deuxième section).
15. Deuxième partie : Les sacrements de la foi
La deuxième partie du Catéchisme expose comment le salut de Dieu, réalisé une fois pour toutes par le Christ Jésus et par l’Esprit Saint, est rendu présent dans les actions sacrées de la liturgie de l’Église (première section), particulièrement dans les sept sacrements (deuxième section).
16. Troisième partie : La vie de la foi
La troisième partie du Catéchisme présente la fin ultime de l’homme, créé à l’image de Dieu : la béatitude, et les chemins pour y parvenir : par un agir droit et libre, avec l’aide de la loi et de la grâce de Dieu (première section) ; par un agir qui réalise le double commandement de la charité, déployé dans les dix Commandements de Dieu (deuxième section).
17. Quatrième partie : La prière dans la vie de la foi
La dernière partie du Catéchisme traite du sens et de l’importance de la prière dans la vie des croyants (première section). Elle s’achève sur un bref commentaire des sept demandes de la prière du Seigneur (deuxième section). En elles, en effet, nous trouvons la somme des biens que nous devons espérer et que notre Père céleste veut nous accorder.
18. V. Indications pratiques pour l’usage de ce Catéchisme
Ce Catéchisme est conçu comme un exposé organique de toute la foi catholique. Il faut donc le lire comme une unité. De nombreux renvois en marge du texte (numéros en italique se référant à d’autres paragraphes traitant du même sujet) et l’index thématique à la fin du volume permettent de voir chaque thème dans son lien avec l’ensemble de la foi.
19. Souvent, les textes de l’Écriture Sainte ne sont pas cités littéralement mais avec la seule indication de leur référence (par " cf. ") en note. Pour une intelligence approfondie de tels passages il convient de se reporter aux textes eux-mêmes. Ces références bibliques sont un instrument de travail pour la catéchèse.
20. L’emploi des petits caractères pour certains passages indique qu’il s’agit de remarques de type historique, apologétique ou d’exposés doctrinaux complémentaires.
21. Les citations, en petits caractères, de sources patristiques, liturgiques, magistérielles ou hagiographiques sont destinées à enrichir l’exposé doctrinal. Souvent ces textes ont été choisis en vue d’un usage directement catéchétique.
22. A la fin de chaque unité thématique, une série de textes brefs résument en des formules ramassées l’essentiel de l’enseignement. Ces " En bref " ont pour but de donner des suggestions à la catéchèse locale pour des formules synthétiques et mémorisables.
23. VI. Les adaptations nécessaires
L’accent de ce Catéchisme porte sur l’exposé doctrinal. En effet, il veut aider à approfondir la connaissance de la foi. Par là même il est orienté vers la maturation de cette foi, son enracinement dans la vie et son rayonnement dans le témoignage (cf. CT 20-22 ; 25).
24. Par sa finalité même, ce Catéchisme ne se propose pas de réaliser les adaptations de l’exposé et des méthodes catéchétiques exigées par les différences de cultures, d’âges, de maturité spirituelle, de situations sociales et ecclésiales de ceux à qui s’adresse la catéchèse. Ces adaptations indispensables relèvent des catéchismes appropriés, et plus encore de ceux qui instruisent les fidèles :
Celui qui enseigne doit " se faire tout à tous " (1 Co 9, 22), pour gagner tout le monde à Jésus-Christ. (...) Surtout qu’il ne s’imagine pas qu’une seule sorte d’âmes lui soit confiée, et que par conséquent il lui est loisible d’enseigner et de former également tous les fidèles à la vraie piété, avec une seule et même méthode et toujours la même ! Qu’il sache bien que les uns sont en Jésus-Christ comme des enfants nouvellement nés, d’autres comme des adolescents, quelques-uns enfin, comme en possession de toutes leurs forces. (...) Ceux qui sont appelés au ministère de la prédication doivent, en transmettant l’enseignement des mystères, de la foi et des règles des mœurs, proportionner leurs paroles à l’esprit et à l’intelligence de leurs auditeurs (Catech. R. préface 11).
25. Pour conclure cette présentation, il est opportun de rappeler ce principe pastoral qu’énonce le Catéchisme Romain :
Toute la finalité de la doctrine et de l’enseignement doit être placée dans l’amour qui ne finit pas. Car on peut bien exposer ce qu’il faut croire, espérer ou faire ; mais surtout on doit toujours faire apparaître l’Amour de Notre Seigneur afin que chacun comprenne que tout acte de vertu parfaitement chrétien n’a pas d’autre origine que l’Amour et pas d’autre terme que l’Amour (Catech. R. préface 10).
218. Au cours de son histoire, Israël a pu découvrir que Dieu n’avait qu’une raison de s’être révélé à lui et de l’avoir choisi parmi tous les peuples pour être à lui : son amour gratuit (cf. Dt 4, 37 ; 7, 8 ; 10, 15). Et Israël de comprendre, grâce à ses prophètes, que c’est encore par amour que Dieu n’a cessé de le sauver (cf. Is 43, 1-7) et de lui pardonner son infidélité et ses péchés (cf. Os 2).
219. L’amour de Dieu pour Israël est comparé à l’amour d’un père pour son fils (Os 11, 1). Cet amour est plus fort que l’amour d’une mère pour ses enfants (cf. Is 49, 14-15). Dieu aime son Peuple plus qu’un époux sa bien-aimée (cf. Is 62, 4-5) ; cet amour sera vainqueur même des pires infidélités (cf. Ez 16 ; Os 11) ; il ira jusqu’au don le plus précieux : " Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné son Fils unique " (Jn 3, 16).
220. L’amour de Dieu est " éternel " (Is 54, 8) : " Car les montagnes peuvent s’en aller et les collines s’ébranler, mais mon amour pour toi ne s’en ira pas " (Is 54, 10). " D’un amour éternel, je t’ai aimé ; c’est pourquoi je t’ai conservé ma faveur " (Jr 31, 3).
221. S. Jean va encore plus loin lorsqu’il atteste : " Dieu est Amour " (1 Jn 4, 8. 16) : l’Être même de Dieu est Amour. En envoyant dans la plénitude des temps son Fils unique et l’Esprit d’Amour, Dieu révèle son secret le plus intime (cf. 1 Co 2, 7-16 ; Ep 3, 9-12) : Il est Lui-même éternellement échange d’amour : Père, Fils et Esprit Saint, et Il nous a destinés à y avoir part.
441. Fils de Dieu, dans l’Ancien Testament, est un titre donné aux anges (cf. Dt 32, 8 ; Jb 1, 6), au peuple de l’Élection (cf. Ex 4, 22 ; Os 11, 1 ; Jr 3, 19 ; Si 36, 11 ; Sg 18, 13), aux enfants d’Israël (cf. Dt 14, 1 ; Os 2, 1) et à leurs rois (cf. 2 S 7, 14 ; Ps 82, 6). Il signifie alors une filiation adoptive qui établit entre Dieu et sa créature des relations d’une intimité particulière. Quand le Roi-Messie promis est dit " fils de Dieu " (cf. 1 Ch 17, 13 ; Ps 2, 7), cela n’implique pas nécessairement, selon le sens littéral de ces textes, qu’il soit plus qu’humain. Ceux qui ont désigné ainsi Jésus en tant que Messie d’Israël (cf. Mt 27, 54) n’ont peut-être pas voulu dire davantage (cf. Lc 23, 47).
442. Il n’en va pas de même pour Pierre quand il confesse Jésus comme " le Christ, le Fils du Dieu vivant " (Mt 16, 16) car celui-ci lui répond avec solennité : " Cette révélation ne t’est pas venue de la chair et du sang mais de mon Père qui est dans les cieux " (Mt 16, 17). Parallèlement Paul dira à propos de sa conversion sur le chemin de Damas : " Quand Celui qui dès le sein maternel m’a mis à part et appelé par sa grâce daigna révéler en moi son Fils pour que je l’annonce parmi les païens... " (Ga 1, 15-16). " Aussitôt il se mit à prêcher Jésus dans les synagogues, proclamant qu’il est le Fils de Dieu " (Ac 9, 20). Ce sera dès le début (cf. 1 Th 1, 10) le centre de la foi apostolique (cf. Jn 20, 31) professée d’abord par Pierre comme fondement de l’Église (cf. Mt 16, 18).
443. Si Pierre a pu reconnaître le caractère transcendant de la filiation divine de Jésus Messie, c’est que celui-ci l’a nettement laissé entendre. Devant le Sanhédrin, à la demande de ses accusateurs : " Tu es donc le Fils de Dieu ", Jésus a répondu : " Vous le dites bien, je le suis " (Lc 22, 70 ; cf. Mt 26, 64 ; Mc 14, 61). Bien avant déjà, Il s’est désigné comme " le Fils " qui connaît le Père (cf. Mt 11, 27 ; 21, 37-38), qui est distinct des " serviteurs " que Dieu a auparavant envoyés à son peuple (cf. Mt 21, 34-36), supérieur aux anges eux-mêmes (cf. Mt 24, 36). Il a distingué sa filiation de celle de ses disciples en ne disant jamais " notre Père " (cf. Mt 5, 48 ; 6, 8 ; 7, 21 ; Lc 11, 13) sauf pour leur ordonner " vous donc priez ainsi : Notre Père " (Mt 6, 9) ; et il a souligné cette distinction : " Mon Père et votre Père " (Jn 20, 17).
444. Les Évangiles rapportent en deux moments solennels, le Baptême et la transfiguration du Christ, la voix du Père qui Le désigne comme son " Fils bien-aimé " (cf. Mt 3, 17 ; 17, 5). Jésus se désigne Lui-même comme " le Fils Unique de Dieu " (Jn 3, 16) et affirme par ce titre sa préexistence éternelle (cf. Jn 10, 36). Il demande la foi " au nom du Fils unique de Dieu " (Jn 3, 18). Cette confession chrétienne apparaît déjà dans l’exclamation du centurion face à Jésus en croix : " Vraiment cet homme était Fils de Dieu " (Mc 15, 39). Dans le mystère pascal seulement le croyant peut donner sa portée ultime au titre de " Fils de Dieu ".
445. C’est après sa Résurrection que sa filiation divine apparaît dans la puissance de son humanité glorifiée : " Selon l’Esprit qui sanctifie, par sa Résurrection d’entre les morts, il a été établi comme Fils de Dieu dans sa puissance " (Rm 1, 4 ; cf. Ac 13, 33). Les apôtres pourront confesser : " Nous avons vu sa gloire, gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité " (Jn 1, 14).
456. " Jésus-Christ a été conçu du Saint-Esprit, Il est né de la Vierge Marie "
Paragraphe 1. Le Fils de Dieu s’est fait homme
I. Pourquoi le Verbe s’est-il fait chair
Avec le Credo de Nicée-Constantinople, nous répondons en confessant : " Pour nous les hommes et pour notre salut Il descendit du ciel ; par l’Esprit Saint, Il a pris chair de la Vierge Marie et s’est fait homme ".
457. Le Verbe s’est fait chair pour nous sauver en nous réconciliant avec Dieu : " C’est Dieu qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés " (1 Jn 4, 10). " Le Père a envoyé son Fils, le sauveur du monde " (1 Jn 4, 14). " Celui-là a paru pour ôter les péchés " (1 Jn 3, 5) :
Malade, notre nature demandait à être guérie ; déchue, à être relevée ; morte, à être ressuscitée. Nous avions perdu la possession du bien, il fallait nous la rendre. Enfermés dans les ténèbres, il fallait nous porter la lumière ; captifs, nous attendions un sauveur ; prisonniers, un secours ; esclaves, un libérateur. Ces raisons-là étaient-elles sans importance ? Ne méritaient-elles pas d’émouvoir Dieu au point de le faire descendre jusqu’à notre nature humaine pour la visiter, puisque l’humanité se trouvait dans un état si misérable et si malheureux ? (S. Grégoire de Nysse, or. catech. 15 : PG 45, 48B).
458. Le Verbe s’est fait chair pour que nous connaissions ainsi l’amour de Dieu : " En ceci s’est manifesté l’amour de Dieu pour nous : Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde afin que nous vivions par lui " (1 Jn 4, 9). " Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle " (Jn 3, 16).
459. Le Verbe s’est fait chair pour être notre modèle de sainteté : " Prenez sur vous mon joug et apprenez de moi... " (Mt 11, 29). " Je suis la voie, la vérité et la vie ; nul ne vient au Père sans passer par moi " (Jn 14, 6). Et le Père, sur la montagne de la Transfiguration, ordonne : " Écoutez-le " (Mc 9, 7 ; cf. Dt 6, 4-5). Il est en effet le modèle des Béatitudes et la norme de la Loi nouvelle : " Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés " (Jn 15, 12). Cet amour implique l’offrande effective de soi-même à sa suite (cf. Mc 8, 34).
460. Le Verbe s’est fait chair pour nous rendre " participants de la nature divine " (2 P 1, 4) : " Car telle est la raison pour laquelle le Verbe s’est fait homme, et le Fils de Dieu, Fils de l’homme : c’est pour que l’homme, en entrant en communion avec le Verbe et en recevant ainsi la filiation divine, devienne fils de Dieu " (S. Irénée, hær. 3, 19, 1). " Car le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous faire Dieu " (S. Athanase, inc. 54, 3 : PG 25, 192B). " Le Fils unique de Dieu, voulant que nous participions à sa divinité, assuma notre nature, afin que Lui, fait homme, fit les hommes Dieu " (S. Thomas d’A., opusc. 57 in festo Corp. Chr. 1).
470. IV. Comment le Fils de Dieu est-il homme ?
Parce que dans l’union mystérieuse de l’Incarnation " la nature humaine a été assumée, non absorbée " (GS 22, § 2), l’Église a été amenée au cours des siècles à confesser la pleine réalité de l’âme humaine, avec ses opérations d’intelligence et de volonté, et du corps humain du Christ. Mais parallèlement, elle a eu à rappeler à chaque fois que la nature humaine du Christ appartient en propre à la personne divine du Fils de Dieu qui l’a assumée. Tout ce qu’il est et ce qu’il fait en elle relève " d’Un de la Trinité ". Le Fils de Dieu communique donc à son humanité son propre mode d’exister personnel dans la Trinité. Ainsi, dans son âme comme dans son corps, le Christ exprime humainement les mœurs divines de la Trinité (cf. Jn 14, 9-10) :
Le Fils de Dieu a travaillé avec des mains d’homme, il a pensé avec une intelligence d’homme, il a agi avec une volonté d’homme, il a aimé avec un cœur d’homme. Né de la Vierge Marie, il est vraiment devenu l’un de nous, en tout semblable à nous, hormis le péché (GS 22, § 2).
471. L’âme et la connaissance humaine du Christ
Apollinaire de Laodicée affirmait que dans le Christ le Verbe avait remplacé l’âme ou l’esprit. Contre cette erreur l’Église a confessé que le Fils éternel a assumé aussi une âme raisonnable humaine (cf. DS 149).
472. Cette âme humaine que le Fils de Dieu a assumée est douée d’une vraie connaissance humaine. En tant que telle celle-ci ne pouvait pas être de soi illimitée : elle était exercée dans les conditions historiques de son existence dans l’espace et le temps. C’est pourquoi le Fils de Dieu a pu vouloir en se faisant homme " croître en sagesse, en taille et en grâce " (Lc 2, 52) et de même avoir à s’enquérir sur ce que dans la condition humaine on doit apprendre de manière expérimentale (cf. Mc 6, 38 ; Mc 8, 27 ; Jn 11, 34 ; etc.). Cela correspondait à la réalité de son abaissement volontaire dans " la condition d’esclave " (Ph 2,7).
473. Mais en même temps, cette connaissance vraiment humaine du Fils de Dieu exprimait la vie divine de sa personne (cf. S. Grégoire le Grand, ep. 10, 39 : DS 475 : PL 77, 1097B). " La nature humaine du Fils de Dieu, non par elle-même mais par son union au Verbe, connaissait et manifestait en elle tout ce qui convient à Dieu " (S. Maxime le Confesseur, qu. dub. 66 : PG 90, 840A). C’est en premier le cas de la connaissance intime et immédiate que le Fils de Dieu fait homme a de son Père (cf. Mc 14, 36 ; Mt 11, 27 ; Jn 1, 18 ; 8, 55 ; etc.). Le Fils montrait aussi dans sa connaissance humaine la pénétration divine qu’il avait des pensées secrètes du cœur des hommes (cf. Mc 2, 8 ; Jn 2, 25 ; 6, 61 ; etc.).
474. De par son union à la Sagesse divine en la personne du Verbe incarné, la connaissance humaine du Christ jouissait en plénitude de la science des desseins éternels qu’il était venu révéler (cf. Mc 8, 31 ; 9, 31 ; 10, 33-34 ; 14, 18-20. 26-30). Ce qu’il reconnaît ignorer dans ce domaine (cf. Mc 13, 32), il déclare ailleurs n’avoir pas mission de le révéler (cf. Ac 1, 7).
687. " Nul ne connaît ce qui concerne Dieu, sinon l’Esprit de Dieu " (1 Co 2, 11). Or, son Esprit qui le révèle nous fait connaître le Christ, son Verbe, sa Parole vivante, mais ne se dit pas lui-même. Celui qui " a parlé par les prophètes " nous fait entendre la Parole du Père. Mais lui, nous ne l’entendons pas. Nous ne le connaissons que dans le mouvement où il nous révèle le Verbe et nous dispose à L’accueillir dans la foi. L’Esprit de Vérité qui nous " dévoile " le Christ " ne parle pas de lui-même " (Jn 16, 13). Un tel effacement, proprement divin, explique pourquoi " le monde ne peut pas le recevoir, parce qu’il ne le voit pas ni ne le connaît ", tandis que ceux qui croient au Christ le connaissent parce qu’il demeure avec eux (Jn 14, 17).
688. L’Église, communion vivante dans la foi des apôtres qu’elle transmet, est le lieu de notre connaissance de l’Esprit Saint :
– dans les Écritures qu’Il a inspirées ;
– dans la Tradition, dont les Pères de l’Église sont les témoins toujours actuels ;
– dans le Magistère de l’Église qu’Il assiste ;
– dans la liturgie sacramentelle, à travers ses paroles et ses symboles, où l’Esprit Saint nous met en communion avec le Christ ;
– dans la prière dans laquelle Il intercède pour nous ;
– dans les charismes et les ministères par lesquels l’Église est édifiée ;
– dans les signes de vie apostolique et missionnaire ;
– dans le témoignage des saints où Il manifeste sa sainteté et continue l’œuvre du salut.
689. I. La mission conjointe du Fils et de l’Esprit
Celui que le Père a envoyé dans nos cœurs, l’Esprit de son Fils (cf. Ga 4, 6) est réellement Dieu. Consubstantiel au Père et au Fils, il en est inséparable, tant dans la Vie intime de la Trinité que dans son don d’amour pour le monde. Mais en adorant la Trinité Sainte, vivifiante, consubstantielle et indivisible, la foi de l’Église professe aussi la distinction des Personnes. Quand le Père envoie son Verbe, Il envoie toujours son Souffle : mission conjointe où le Fils et l’Esprit Saint sont distincts mais inséparables. Certes, c’est le Christ qui paraît, Lui, l’Image visible du Dieu invisible, mais c’est l’Esprit Saint qui Le révèle.
690. Jésus est Christ, " oint ", parce que l’Esprit en est l’Onction et tout ce qui advient à partir de l’Incarnation découle de cette plénitude (cf. Jn 3, 34). Quand enfin le Christ est glorifié (cf. Jn 7, 39), il peut à son tour, d’auprès du Père, envoyer l’Esprit à ceux qui croient en lui : il leur communique sa Gloire (cf. Jn 17, 22), c’est-à-dire l’Esprit Saint qui le glorifie (cf. Jn 16, 14). La mission conjointe se déploiera dès lors dans les enfants adoptés par le Père dans le Corps de son Fils : la mission de l’Esprit d’adoption sera de les unir au Christ et de les faire vivre en lui :
La notion de l’onction suggère (...) qu’il n’y a aucune distance entre le Fils et l’Esprit. En effet de même qu’entre la surface du corps et l’onction de l’huile ni la raison ni la sensation ne connaissent aucun intermédiaire, ainsi est immédiat le contact du Fils avec l’Esprit, si bien que pour celui qui va prendre contact avec le Fils par la foi, il est nécessaire de rencontrer d’abord l’huile par le contact. En effet il n’y a aucune partie qui soit nue de l’Esprit Saint. C’est pourquoi la confession de la Seigneurie du Fils se fait dans l’Esprit Saint pour ceux qui la reçoivent, l’Esprit venant de toutes parts au devant de ceux qui s’approchent par la foi (S. Grégoire de Nysse, Spir. 3, 1 : PG 45, 1321A-B).
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